Copyrights : L'Histoire s'inspire de l'univers de la série "Highlander". Univers qui ne m'appartient pas ( si, si !! ). Mais mes personnages Ethan, Catherine, Marshall et Rendall sont mes créations !
Résumé : Ethan et Catherine sont rappelés à Londres par un vieil ami. Mais ils vont se retrouver embarquer dans une histoire qui les dépasse.
Genre : Drama. Année : 2001, à Londres.
Note de l'auteur : C'est la première fois que j'écris une fanfiction sur la série "Highlander". Je réclame l'indulgence des lecteurs. Mais j'apprécierais énormément des commentaires ( feedback ), en bien comme en mal : les critiques constructives sont appréciées !
Auteur : Lyrys-In-Love



HENRI... EPITAPHE POUR UN TUEUR




Le temps est relatif, a dit Albert Einstein. Mais que pensez-vous de personnes sur qui le temps n'a pas d'emprise. Qui, à travers les siècles, ne prennent ni ride, ni cheveux blancs ? Vieux rêves d'immortalité, anciennes légendes mythologiques me répondrez-vous. Et si je vous disais que je suis l'un d'eux. Que je suis immortel. Un fou de plus sur notre planète ? Faux. Là encore, " immortel " est relatif. Immortel dans le sens où on ne vieillit pas, les années n'ont pas d'emprise sur nous. Immortel dans le sens où un couteau transperçant notre cœur n'aura pas de conséquences sur notre vie. Mais mortel dans le sens où la décapitation nous tue. Il existe un Jeu. Qui n'a rien d'un jeu. Et qui existe depuis que l'homme se souvient. Dans ce jeu, un seul mot d'ordre : il ne peut en rester qu'un. Un seul. Le dernier. Celui qui aura la réelle immortalité. Jusqu'à Armageddon.

Mon nom actuel est Ethan Anderson. Ce n'est qu'un pseudonyme parmi tant d'autres. Mon nom réel est Laïos. Mais je ne le porte plus depuis longtemps. Très longtemps. Depuis trois mille cent quatre-vingt cinq ans exactement. Depuis ce fameux jour. Le jour où je suis mort. Le jour où mon peuple est mort. J'avais vingt-cinq ans à l'époque. Cela me paraît hier. Je sens encore l'odeur des toits, des maisons dégageant une âcre fumée épaisse et suffocante, s'embrasant telles des feuilles sèches jetées dans un feu, j'entends encore les cris des habitants, des cris de désespoir et de terreur face au massacre. Des visages effrayés. Des figures de cauchemars pillant la cité. Et le cheval. Ce cheval si fier qui causa notre perte à tous. Je revois encore le soleil qui se leva ce jour-là parmi les décombres encore fumantes de ma ville. Il m'avait semblé différent. Sa rougeur et sa mélancolie découvrant un horizon qui avait changé à tout jamais. J'étais immortel. Troie n'était plus. On était en 1184 avant J.C.


Partie 1


Le voyage en avion avait été particulièrement long. Il lui avait semblé que des siècles s'étaient écoulés depuis qu'il avait quitté Sydney en direction de Londres. Le pluvieux temps britannique, auquel il n'avait jamais réussi à s'habituer, l'accueillait avec une bruine glaciale qui achevait de le réveiller. L'aéroport de Gatwick était aussi peu accueillant qu'à l'accoutumée.
Il sentit un buzz. Katherine l'attendait à la sortie, porte 3. Elle paraissait aussi peu apprécier le temps anglais que lui à en juger par sa mine renfrognée et par son anorak remonté jusqu'aux oreilles. C'est à peine si elle lui adressa un sourire d'accueil. Elle se détourna immédiatement qu'il l'eut rejoint.
_ Ravie de te voir enfin arriver, Ethan. Cela fait deux heures que je poirote. Je commençais à désespérer.
_ L'escale à Buenos Aires a duré plus longtemps que prévu, dit-il sur un ton d'excuse.
_ Je déteste Londres.
_ Tu n'es pas la seule.
_ Pourquoi nous avoir donné rendez-vous ici alors ?
_ Je n'ai rien fait. Henri m'a téléphoné hier, ou avant-hier, je ne sais pas avec le décalage horaire… C'est lui qui m'a demandé de venir.
_ Il a dit pourquoi ?
_ Non. Juste que c'était très important. Connaissant Henri, je veux bien le croire.
_ Sais-tu que j'étais assise tranquillement sur une petite plage privé en Tunisie en plein soleil, il y a vingt-quatre heures ?
_ Sais-tu que j'étais aux côtés d'une ravissante mannequin, en train de siroter un cocktail, sur les bords d'une piscine, il y a vingt-quatre heures ?
_ Si ce n'est pas important. Je te jure que je lui coupe la tête.
Ethan sourit en montant dans la voiture.
_ Tu auras ma bénédiction.

Henri Lagrange, aristocrate français, émigré en Angleterre durant la révolution de 1789, s'occupait actuellement d'une librairie en ruine, au coin de deux ruelles dans le même état que la boutique. Ethan lui avait bien proposé de l'argent pour acheter un nouveau magasin, ou du moins faire quelques réparations, mais Henri n'avait rien voulu entendre.
_ Je déteste cet endroit. C'est trop glauque. Crois-tu réellement que des clients oseraient se risquer jusque là pour acheter quelques bouquins datant du siècle dernier ? soupira Catherine.
La bruine s'était transformé en pluie bien réelle. Ils étaient trempés. Aucun d'eux n'avaient pensé à prendre un parapluie, et le taxi avait refusé de les laisser plus prés dans l'impasse, car il était déjà tard. Pour comble de malchance, personne ne répondait au bruit de sonnette sur laquelle Catherine ne cessait d'appuyer.
_ Génial, grogna Ethan en observant les fenêtres du haut, d'où aurait dû percer de la lumière si le français avait été là.
Ils ne ressentaient aucun présence. Mais chacun des deux savaient que cela ne voulait rien dire : le buzz était quelque chose d'aléatoire, variant selon la pression atmosphérique et d'autres phénomènes physiques dont les deux immortels n'avaient que des notions très limitées - mais Roman Svilatcik, un scientifique immortel avait étudié tout au long du XXème siècle ce genre de phénomène, et les deux avaient lu - plus que compris - le rapport final.
Catherine s'appuya contre la porte. Elle posa sa tête en arrière et ferma les yeux. L'eau avait rendu son long manteau beige quasi transparent, et sa fine épée de voyage était maintenant clairement visible. Ses mèches blondes s'étaient collées sur son visage, les gouttes perlant le long de son nez. Ses lèvres avaient pris ce petit rictus qu'elle prenait toujours lorsqu'elle était contrariée.
_ Bon. Je te propose d'aller à mon appartement pour la nuit. Il n'est pas là.
_ Ce seraient des avances ?
_ Tu préfères rester là sous la pluie sans doute ? murmura-t-il avec un air exaspéré.
_ On pourrait essayer d'entrer, déclara-t-elle en se penchant vers la vitre pour tenter de distinguer quelque chose à l'intérieur dans la pénombre.
_ Et l'alarme ?
_ Voyons. C'est de ce bon vieux Henri que nous parlons. L'homme qui peine à passer à l'électricité. Alors une alarme…
Ethan secoua doucement la tête avec un léger sourire.
_ Ecarte-toi, dit-il.
Il avait sorti une lampe de poche. Le rayon lumineux se fixa sur la serrure de la porte d'entrée du magasin. Contrairement à tous les commerçants ordinaires, Henri Lagrange rejetait la devanture en fer, et gardait la mode des boutiques du siècle dernier. La porte était telle une porte d'entrée, et, de vieux modèle, elle était facile à forcer pour quelqu'un comme Ethan.
En le voyant sortir ce qu'elle appelait " l'ouvre porte ", Catherine poussa un cri.
_ Tu te promènes toujours avec cet attirail sur toi ?
Penché sur la serrure, Ethan lui répondit d'un ton distant :
_ Je savais que j'avais rendez-vous avec toi, chérie.
_ Tu m'en veux encore pour la dernière fois ! s'exclama-t-elle en se plantant à ses côtés.
_ Pourquoi t'en voudrais-je ? demanda-t-il en se redressant, et en ouvrant la porte.
Il l'invita galamment à entrer.
_ Je sais très bien que tu n'a pas apprécié Charles.
_ Charles, Martin, Kevin, Bamboula… énuméra négligemment Ethan en cherchant l'interrupteur.
_ Bobula ! rectifia Catherine. Et il était charmant ! C'était un vrai shaman de sa tribu.
_ Quelle tribu ? Celle des escrocs en tout genre ?
_ Ne soit pas de mauvaise langue veux-tu ? Je l'aimais bien.
_ Il m'a dérobé pour prés d'un million de dollars de bijoux.
_ Vu qu'il y a eu le crack de Wall Street trois jours plus tard, je ne pense pas qu'il ait pu réellement en profiter.
Ethan trouva enfin l'interrupteur. Le spectacle qui s'offrit à eux coupa net la dispute. Un bazar indescriptible régnait dans la libraire. Mais les livres à moitié déchirés et noircis ne laissaient pas de place au moindre doute : un quickening avait eu lieu ici. Instinctivement, les deux immortels étaient sur leurs gardes. Ils avancèrent dans ce qui avait dû être un champ de bataille. Ce fut Catherine qui trouva en premier l'origine du Quickening.
_ Oh mon Dieu ! s'exclama-t-elle en se sentant défaillir.
Ethan reconnut le corps décapité d'une personne qui avait été son ami. Un ami étrange certes. Mais un ami sincère. Et combien en comptait-on à travers le monde ?
_ C'est pas vrai… soupira-t-il en s'agenouillant prés du corps.
Cela s'était passé il y a plusieurs heures déjà. A la rigidité du corps, Ethan aurait dit une demi-douzaine d'heure. Il restait quelques relents du quickening dans la pièce. Un médecin légiste serait probablement plus précis que lui.
Catherine restait sur le côté. Elle fixait sur le corps sans pouvoir s'en détacher. A l'évidence, elle était très choquée. Ethan oubliait parfois sa fragilité. Elle était encore jeune… Il tira une des nappes de dessous la grande bibliothèque, et en recouvrit le cadavre.
Il alla chercher un verre d'eau pour Catherine. Son ancienne étudiante repoussa le récipient d'un geste mécanique.
_ Quelque chose de plus fort, s'il te plaît.
Il lui tendit une bouteille de vodka, en priant pour qu'elle ne se soûle pas. Il n'avait pas besoin de ça aujourd'hui.
Catherine partit au fond du magasin, la bouteille à la main, le pas traînant.

Une heure plus tard, ils pénétraient dans le petit appartement en centre-ville d'Ethan. Catherine s'était murée dans un mutisme qui inquiétait son ami. Il ne lui demandait pas de prendre ça de manière impassible, mais être aussi affectée n'était pas non plus une bonne chose. Londres était une ville dangereuse. Une immortelle en pleine déprime n'y avait pas sa place.
Il la mit au lit comme une enfant. Elle se laissa faire. La vodka lui avait assombri les pensées, et l'abrutissement la gagnait.
Ethan lui laissa un mot, et ressortit après s'être rapidement changé. Une seule question, presque une obsession : Qui ? Il n'en avait pas la moindre idée, pas le moindre début de piste. Est-ce que ça avait un rapport avec le fait que Henri lui avait demandé de rentrer précipitamment ? Ou tout simplement le Jeu ?

En ouvrant sa porte, Hughes Marshall crut défaillir. Il pâlit.
_ Qu'est-ce que… ?
_ Je veux savoir qui a tué Henri Lagrange.
_ Je ne suis pas votre indic' perso, Anderson !
Ethan lui saisit le bras, le forçant à re-rentrer. Il ferma la porte derrière lui. Son regard avait pris une teinte mortelle.
_ Je vous conseille de me le dire sans trop de résistance.
_ Nous avions un accord ! s'exclama le guetteur avec énervement. Je ne vous suivais pas en Australie, et vous faisiez comme si vous ne connaissiez rien des guetteurs durant mon épreuve de confirmation !
_ Il a été tué il y a quelques heures.
_ Alors cela ne sera probablement pas déjà ajouté.
Le visage du guetteur était plus blanc qu'un linge. Anderson était son deuxième immortel. Son premier, Jacob Sanders, avait été tué il y a six ans, au Caire. On lui avait confié comme deuxième mission un immortel qui avait plutôt l'habitude d'échapper à ses guetteurs, et dont le millénaire de vie ressemblait à une tranche de gruyère, tant les trous existaient dans ses Chroniques. Marshall avait vite compris la raison de ces blancs : Ethan Anderson connaissait tout des guetteurs. Les tatouages, leurs méthodes, la hiérarchie… Marshall soupçonnait l'immortel d'avoir été lui-même guetteur autrefois. Mais il n'avait aucune preuve.
Ethan lui avait faussé compagnie le deuxième jour de surveillance. Une semaine plus tard, il se présentait de lui-même au domicile de Marshall, manquant de provoquer une crise cardiaque chez l'infortuné guetteur. Il avait été très clair avec Marshall : il acceptait de se laisser guetter sous certaines conditions, mais il pouvait exiger l'effacement de certaines choses de ces chroniques.
Ce n'était pas très glorieux de se faire repérer dés la première semaine par son immortel. Et d'apprendre qu'Anderson savait pour les Guetteurs n'avait pas arrangé les choses. Il y a 6 ans, le scandale " Joe Dawson " éclatait juste. Les Guetteurs renégats, les tensions immortels-guetteurs étaient à leur maximum. Comment Marshall aurait-il dû réagir ? Oser en parler à sa hiérarchie dans le contexte actuel, et rajouter ainsi de nouveaux soucis ? Marshall avait pensé à sa carrière, au tribunal où il risquerait de passer vu l'état des choses. Il s'était tut, avait passé un accord tacite avec Anderson ; et l'immortel et le guetteur avait chacun regagné leur route. Néanmoins, Anderson l'avait contacté plusieurs fois au cours de ces dernières années. La plupart du temps pour connaître des nouvelles de certains immortels. Mais jamais aucune interférence avec le Jeu lui-même.
En début de mois, un enquêteur avait été dépêché de Paris pour évaluer les compétences de chacun des guetteurs en poste à Londres. Marshall avait fait promettre à Anderson de ne rien faire qui risquerait de l'incriminer durant cette période.
Et voilà que l'immortel débarquait chez lui et lui demandait de rompre son serment sous les yeux du contrôleur… De mieux en mieux…
Marshall se dégagea de la pression d'Anderson.
_ Je ne peux pas faire ça ! Je suis un guetteur !
_ Raison de plus. Marshall, je veux savoir qui l'a tué. Je regretterais d'en venir à d'autres moyens.
_ Vous me menacez ?
_ Rien de tel. Je veux savoir qui l'a tué ! répéta Ethan.
Brusquement, il se détourna, laissant un Marshall encore tremblant. Le regard d'Ethan balaya la pièce. Elle était spacieuse, mais pauvrement meublé. Seule une grande bibliothèque posée contre le mur, cachant à moitié la fenêtre, sauvait l'honneur. Ethan se dit que la société des guetteurs était vraiment en perte de vitesse au cours de ce XXème siècle.
Marshall observa d'un air pensif l'immortel, alors qu'il remettait son pull correctement. Il s'était toujours senti mal à l'aise devant Anderson. Bien sûr il était le seul immortel qu'il ai jamais rencontré face à face. Mais il y avait quelque chose d'autre qui le gênait. Parfois, quand il lui parlait, il avait l'impression d'avoir à faire à un jeune homme sans expérience, impétueux et passionné - Anderson étant mort jeune, cela ne faisait qu'accentuer le sentiment, puis, l'instant d'après, c'était quelqu'un de froid et presque cruel qu'il avait en face de lui. Lequel des deux était vrai ? Probablement aucun. Mais cela ne contribuait pas à calmer Marshall. Il n'aimait pas se retrouver dans la même pièce qu'Anderson, et cela ne changerait probablement jamais.
Toujours très classe, Ethan Anderson portait la plupart du temps des vêtements dont le prix ferait frémir n'importe qui. Ce n'était un secret pour personne que l'immortel était riche. Très riche. La question était de savoir d'où lui provenait toute cette fortune. Mais là encore, les enquêtes menées au cours des cinquante dernières années n'avaient pas abouti à des résultats très probants. Anderson avait connu sa première mort tôt. Les spécialistes des guetteurs ne lui donnaient pas plus de 27 ans. Il avait des cheveux sombres, mais pas noirs : quelques reflets roux trompaient un observateur peu avisé. D'un teint plutôt pâle, ces yeux verts ressortaient, et lui donnait un regard très expressif, qui était à la fois envoûtant et mystérieux, d'une profondeur que l'on ne trouvait que chez les immortels. C'était d'ailleurs ce magnétisme, ce charisme qui avait en premier interpellé Marshall. Anderson était un brillant orateur, il savait capter l'attention des gens, leur intérêt. Sur un classement effectué officieusement par les femmes de la branche recherche des Guetteurs de Londres, Anderson faisait partie du " top 5 des immortels les plus sexy ". D'ailleurs, Marshall se demandait si la rumeur de l'existence d'un tel classement n'avait pas précipiter l'arrivée du contrôleur de Paris.
_ Très bien, murmura-t-il en écartant les bras en signe de défaite. Je vais me renseigner. Je vous appelle dés que j'ai quelque chose, mais pour l'amour du ciel, ne m'adressez plus la parole jusqu'à la fin de l'inspection.
_ Promis, déclara Ethan avec un sourire de remerciement en se dirigeant vers la porte.
Il sortit sans se retourner.

Il devait être plus de deux heures maintenant. Il avait cessé de pleuvoir, mais l'air restait chargé d'une humidité désagréable. Le goudron reflétait les lumières des lampadaires, éblouissant presque par moment. Les rues étaient désertes, mis à part quelques âmes en peine, et ivrognes qui quittaient leur bar de prédilection pour se lancer dans le grand Londres de la nuit et de la bière.
Ethan marchait sans but précis. Il avait quitté le domicile de Marshall à pied, et avait négligé sa voiture qu'il avait laissé sur un parking prés de chez le guetteur. Malgré la lourdeur ambiante, un air vivifiant, fugitif, passait dans les rues de la capitale britannique. Ethan n'aimait pas Londres. Du moins pas le Londres de maintenant, où les nouvelles constructions, les buildings à l'architecture de pointe, côtoyaient les anciens pavillons, et les demeures du temps du Grand Empire Britannique.
L'atmosphère qui se dégageait de la ville était un curieux mélange malsain. Peut-être sentait-il une similitude avec ce qu'il éprouvait au fond de lui-même et cette cité étirée entre deux pôles, deux moments, deux périodes de son histoire.
La Tamise était toujours aussi plate. Toujours aussi calme. La lune se reflétait sur l'eau trouble, dévoilant des remous imperceptibles. Ethan repensa à Henri Lagrange. Cet aristocrate qui avait quitté la France au moment de la Terreur, en 1993, s'embarquant tel un clandestin sur son navire. Il avait été tué par un des hommes d'Ethan, lorsque l'équipage s'était aperçu de la présence du clandestin. Ethan l'avait pris sous sa protection. Il lui avait expliqué le concept de l'immortalité, le Jeu. Les règles du Jeu. Henri n'avait jamais souhaité vivre éternellement, et n'avait jamais manifesté le moindre intérêt pour le Prix final. Il n'avait alors qu'un but : vivre sa vie d'homme une centaine d'années, et remercier le Seigneur pour ce cadeau divin. Ethan doutait que Dieu - ou les Dieux - aient une quelconque incidence sur leur destinée d'immortel, et ne pensait pas qu'il y avait quoique ce soit de divin dans l'immortalité ; mais ça, Henri aurait eu le temps de l'apprendre en vieillissant. Il revoyait ce français maniaque sur les bords, adorateur de Shakespeare, et qui gardait dans son magasin une collection impressionnante de vieux ouvrages dont tout le monde avait oublié l'existence aujourd'hui. Perdu dans ses pensées, il entendit à peine la sonnerie de son portable. Il lui fallut plusieurs secondes pour réagir.
_ Anderson, dit-il lorsqu'il décrocha enfin.
_ J'ai votre information : il s'agit d'un certain Roger Rendall.
_ Un Chasseur ?
_ Oui. Il…
Marshall parut hésiter. Finalement, il déclara :
_ Il a été abattu par Rendall. Puis décapité. L'immortel n'a pas respecté les règles.
Le silence à l'autre bout de la ligne de bureau parut s'éterniser.
_ Anderson ? Vous êtes toujours là ? demanda Marshall d'une voix inquiète tout en se demandant ce qu'il venait de faire.
_ Oui. Où est-ce que je peux le trouver ?
_ Je ne peux pas vous le dire. J'ai juré de ne jamais interférer dans les combats entre immortels. Je suis déjà allé beaucoup trop loin, et vous le savez.
_ Rendall n'a pas respecté les règles. Pourquoi est-ce que vous les respecteriez pour lui ? s'écria Ethan qui tremblait de fureur.
Sa main serrait la rampe des escaliers. Une violente douleur vrilla dans toute sa paume : une pointe venait de transpercer sa peau. La souffrance lui permit de retrouver le sens des réalités. La vengeance embrumait l'esprit. C'était le meilleur moyen pour perdre sa tête. La règle de base qu'avait appliqué Ethan au cours de ces trois millénaires de survie : ne jamais se laisser gouverner par ses sentiments. Il fallait toujours reconsidérer la situation avec le recul pour être parfaitement lucide. La lucidité, la capacité de juger froidement n'importe quelle situation, c'était ça sa ligne de conduite. Il fallait qu'il se calme.
Il retira sa main ensanglantée de la rampe, et la secoua tandis que la blessure se refermait.
_ Marshall ? appela-t-il en ayant repris son sang froid.
Le guetteur ne répondit pas tout de suite.
_ Il a une chambre au " Union Third Hôtel ". C'est à…
_ Je sais où c'est, coupa Anderson. Merci.
Il raccrocha.
En entendant la tonalité de sa ligne de téléphone, et le " bip bip " indiquant que la communication était coupée, Marshall se sentit encore plus mal. Qu'avait-il fait ? Il était intervenu dans un duel d'immortels, il avait transmis des infos classées secrètes à la dernière personne à laquelle il aurait du les donner.



Fin de la Partie 1. A suivre...



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Lyrys-In-Love