L'Enfant du Yukon

Introduction:

En 2014, la Troisième Guerre mondiale éclate. D'un côté, la Confédération des Pays Libérés, ou CPL, dirigée par l'ancien dictateur Esperanza. De l'autre, un réseau de résistance étendu à l'ensemble du monde baptisé Opposition, et mise en place par le multi-milliardaire Charles Bergman. En 2020, cette guerre a déjà provoqué de nombreuses pertes parmi les hommes. Mortels comme Immortels. Car chaque Immortel a pris parti pour un camp ou pour l'autre. Plus le temps passe, plus les Immortels s'affrontent au nom de la CPL ou de l'Opposition. Plus les têtes tombent, plus l'heure de la Rencontre approche.

Episode 1:

Barbe-rousse

Il s'appelle Nelson Fullman. Il est né en 2001 dans la vallée glacée du Yukon, en Alaska. Sa ville natale, Fairbanks, a été prise par les troupes du commandant Hägen.Depuis des jours, il tente de survivre parmis les décombres. La mort l'a séparé de sa famille et de ses amis, mais il tente tout de même de sauver sa peau. Il ne sait pas encore qu'il ne peut pas mourir. Mais il ne va pas tarder à l'apprendre.

 

Nelson poussa la porte du grand hangar désaffecté, se remémorant les nombreuses soirés passées ici avec des copains. A présent, c'est pratiquement devenu son dernier refuge. Cela fait deux jours que "le fou" le poursuit à travers la ville.

Deux jours auparavant

Nelson et Debbie suivaient Harry qui avait trouvé une brèche dans l'infranchissable muraille que formait les troupes de la CPL. Affronter l'hiver ou risquer de se faire massacrer par les soldats, le choix était évident pour les trois amis d'enfance. Alors qu'ils passaient à quelques mètres d'une tente marquée du phoénix, le symbole de la CPL, l'officier qui devait l'occuper en sortit, un homme de petite taille, aux cheveux roux, arborant une barbe rase toute aussi rousse que la chevelure. C'était un officier, l'uniforme noir et l'armure en acier blanc ne laissaient plâner aucun doute la-dessus. Barbe-rousse semblait chercher quelqu'un. Ou quelque chose. Nelson pensa qu'il les cherchait, eux. Comme s'il avait senti leur présence. Barbe-rousse posa les yeux sur lui. Son regard figea Nelson dans son élan. Barbe-rousse prit son arme dans sa main. Sans paraître quitter Nelson des yeux, il abattit Harry et Debbie. Puis il sourit à Nelson. Un sourire macabre. Le sourire que devait faire la Mort lorsqu'elle venait vous chercher. Comme se réveillant soudainement après un terrible cauchemar, Nelson prit ses jambes à son cou et s'enfuit dans les ruelles sombres. L'officier rengaina son pistolet, et accompagné de trois soldats, partit à la suite du jeune homme.

Depuis que Debbie et Harry étaient morts, Nelson se posait une question. Pourquoi Barbe-rousse ne l'avait-il pas tué en même temps que ses camarades d'infortune. Après tout il en avait eu largement le temps. Sa réflexion fut interrompue par des bruits de course. Les soldats approchaient. Nelson chercha une cachette mais ne trouva qu'une colonne et se plaqua derrière. Les bruits de course cessèrent. Les ombres des trois soldats envahirent le sol du hangar. Nelson tenta un bref coup d'oeil derrière la colonne: leur chef n'était pas là. Pour une raison inconnue, Nelson se sentit rassuré de ne pas le voir. Peut-être parce qu'il lui paraissait comme le Diable en personne. Mais cela ne dura pas longtemps.

_"Laissez, je vais m'en occuper! Rompez!"

Obéissant aux ordres de leur supérieur, les soldats quittèrent le bâtiment. Nelson était maintenant seul avec Barbe-rousse. Il tenta alors un nouveau coup d'oeil derrière la colonne. Barbe-rousse tenait une hache à la main et l'appelait.

_"Viens gamin, ça sera pas long, je te promets."

A ces mots, il se colla encore plus contre la colonne. Mais il pensait qu'un truc clochait. La hache! Une hache? Nouveau coup d'oeil derrière la colonne. Il n'avait pas rêvé. C'était bien une hache que Barbe-rousse tenait entre ses mains. Malheureusement, celui-ci l'avait repéré. Il avançait vers lui avec le même sourire qu'après avoir tué Debbie et Harry. Nelson démarra au quart de tour. Il enjamba les marches du vieil escalier rouillé menant à une passerelle quatre à quatre, puis trébucha sur la dernière et s'étala de tout son long. Il regarda derrière lui et vit l'affreuse hache de Barbe-rousse au dessus de la tête de son propriétaire. Puis la lame s'abattit lourdement sur le dos de Nelson, lui brisant la colonne vertébrale.

_"C'est même plus marrant à nôtre époque."

Hägen regrettait vraiment l'époque où les jeunes garçons apprenaient à se battre dès qu'ils devenaient assez fort pour soulever une épée. A cette époque, même un pré-Immortel pouvait donner du fil à retordre. A cette époque, les hommes ne se laissaient pas tuer sans vendre chèrement leur peau. Maintenant, un garçon comme celui-ci a grandi dans les jupes de sa mère. La seule activité physique qu'il aura exercé était tout au plus un poste d'ailier dans l'équipe de football locale. Pathétique! Il ne tirerait aucune fierté à avoir pris sa tête. Depuis le milieu du 19ème siècle, la chasse aux pré-Immortels avait perdu de son charme. Mais malgré cela Hägen continuait. Parce qu'il aimait voir la terreur dans les yeux de ses victimes et la surprise à la vue d'une hache qui avait traversé les siècles. Et puis Hägen considérait qu'aucun quickening n'était négligeable. Mais ce ne fut qu'à cet instant que le guerrier du Nord remarqua: l'aura de ce jeune garçon était très importante. Elle semblait emplir le hangar. Hägen se dit qu'il fallait le tuer maintenant, où bien il deviendrait un rival trop fort dans quelques siècles. Mais il devait attendre qu'il rescussite pour pouvoir profiter du quickening. Hägen perçut soudain une aura. Le gosse ne s'était pourtant pas réveillé. Il ne restait donc qu'une seule possibilité: un autre Immortel approchait.

Marco Cesario marchait silencieusement dans la ruelle en compagnie de son ami, James MacHendry. Ils tentaient de trouver un moyen de sortir de la ville mais sans succès. Soudain, Cesario sentit la présence d'un Immortel. Dans le hangar dont ils longeaient le mur. Cesario sortit son épée.

_"Attendez, sergent!"

James avait entendu des gens parler. Il regarda et vit les soldats de Hägen attendre leur chef à quelques mètres dans la rue, àç côté d'un camion.

_"Occupe-toi d'eux. Moi je vais rendre visite à mon congénère."

_"Ok, sergent!"

Cesario pénétra alors discrètement dans le hangar.

Hägen observa le nouvel arrivant. Cet enfoiré venait gâcher la fête. Mais il décida néanmoins de l'accueillir comme il se devait.

_"Je suis le commandant Tomhass Hägen, commandant en chef des troupes terrestres de la CPL. Je suis heureux de vous rencontrer cher ami, même si vous faîtes partie du camp opposé."

En effet, Cesario portait l'uniforme vert de l'Opposition.

_"Mon nom est Marco Cesario, soldat parmi les forces de l'Opposition. La cause que nous défendons étant différente, nous avons là une raison suffisante pour nous battre en duel."

_"Sachez que même sans cela, je vous aurait défié."

Hägen descendit alors à la rencontre de son adversaire et prit sa hache à deux mains. Il ne voulait pas se battre sur la passerelle, de peur que l'autre ne découvre le gosse. Hägen fut surpris par la posture qu'adoptait Cesario avec son épée. Il tenait son arme, un glaive de la Légion romaine, derrière son dos. Tant pis pour lui, se dit Hägen avant d'abattre sa hache sur son adversaire. Mais la lame rencontra le glaive. A cet instant, le viking comprit qu'il n'avait pas affaire à n'importe qui. La rapidité que Cesario avait mis à ramener sa lame devant lui démontrait une grande agilité et une grande vitesse d'éxécution. Il n'avait même pas tremblé malgré la puissance du coup. Ni une ni deux, Cesario tenta de profiter de l'effet de surprise pour entailler le ventre de son adversaire. Hägen jeta alors son corps en arrière et para le coup ave sa hache. Puis il profita de l'élan que son arme avait prise pour porter un nouveau coup. Cesario faisait preuve d'une extrême souplesse malgré sa corpulence, et parait tous les coups de Hägenn quant à lui maîtrisait parfaitement le poids de sa hache et s'en servait pour porter des coups alliant puissance et précision. Le combat s'interrompit soudain car chacun avait ressenti l'aura d'un autre Immortel. Cesario remarqua à ce moment le sang sur la lame de la hache. N'ayant pas été atteint lors du duel, ce sang provenait de quelqu'un d'autre. Le sang, l'aura... Cesario comprit.

_"Espèce d'enfoiré, tu espérais assassiner un nouveau!"

_"Ca ne te regarde pas!"

Tous deux se ruèrent vers l'escalier. Hägen fut stoppé dans sa course par Cesario, qui lui avait porté une entaille derrière les genoux. Hägen tomba à terre, puis Cesario l'assomma avec le pommeau de son glaive. Le soldat Opposant gravit l'escalier et trouva Nelson, surpris d'être encore en vie.

_"Je m'appelle Cesario, et il vaudrait mieux pour toi que tu viennes avec moi."

Nelson repensa à Barbe-rousse. Le choix à faire parut alors évidente. Il se leva alors et suivit Cesario. En sortant du hangar il vit le corps de Hägen gisant au sol.

_"Vous l'avez tué?"

_"Si on veut..."

Dehors un camion de la CPL les attendait.

_"On est cuits!"

_"Non, c'est Jim."

Jim ne pouvant être qu'un ami de Cesario, il suivit celui-ci à l'arrière du camion. James MacHendry, qui avait revêti un uniforme de la CPL, démarra le camion. Après avoir passé sans accroc les barrages, le véhicule s'enfonça dans la vallée.

Fin du 1er épisode

 

 

Episode 2:

Le glaive de la justice

Il s'appelle Nelson Fullman. Il est né en 2001 à Fairbanks, dans la vallée glacée du Yukon, en Alaska. Il a trouvé la mort auprès du commandant Hägen. Mais il est revenu à la vie et a trouvé une aide précieuse en la personne du sergent Cesario, un soldat de l'Opposition, et son ami MacHendry. Il ne sait pas encore qui il est. Mais il ne va pas tarder à l'apprendre.

 

Le camion de la CPL roulait depuis bientôt deux heures. Pendant ces deux heures, Cesario avait expliqué à Nelson pourquoi il était toujours en vie.

_"Désormais, petit, tu es un Immortel. Tu vivras peut-être longtemps, mais ce sera au prix de nombreuses victoires sur d'autres Immortels. Maintes fois tu risqueras ta tête, maintes fois tu prendras celle des autres."

_"Vous dîtes que pour les tuer, je dois leur couper la tête? C'est incensé!"

_"Mais malheureusement, c'est comme ça. Tu crois que c'est pour s'amuser qu'on se promène tous avec une épée?"

_"Pas tous. Hägen n'a pas d'épée."

Jim venait de parler. La première fois depuis le début du trajet. Nelson avait déjà rencontré des gens peu bavards, mais celui-là battait les records. James MacHendry était né à Glasgow, en 1991, dans une famille d'ouvriers. Il avait rejoint les rangs de l'Opposition en 2015 et avait été affecté au détachement dirigé par le sergent Cesario. Lorsque leur base de Anchorage avait été rasée par les missiles de la CPL, Jim avait survécu, sauvé par le sergent, qui avait volontairement reçu le morceau de plafond sur la tête à sa place. Depuis il l'accompagnait. Cesario avait fini par lui révéler son Immortalité.

_"Va falloir penser à trouver un coin pour pieuter, sergent."

_"J'y pensais, justement."

Nelson se jugea alors apte à intervenir dans la conversation.

_"Il y a un petit motel plus loin sur la route, il me semble. J'ai dû y passer une ou deux fois avec mon père."

A l'évocation du mot "père", Cesario pensa au sien. Du moins il essaya. Il ne s'en souvenait pas. Il faut dire que le pauvre homme était décédé il y a plus de 2000 ans. Cela le rendit un peu triste. C'était un des mauvais côtés de l'Immortalité. On perdait les gens qui nous étaient chers, mais le pire était qu'on finissait par les oublier. Cesario balaya ses pensées qui finiraient tôt ou tard par lui tirer quelques larmes. Puis il reporta son attention sur Nelson.

_"Je peux vous poser une question?"

_"Vas-y."

_"Vous avez quel âge?"

_"J'ai arrêté de compter lorsque j'ai passé le cap des 600 ans. Mais si tu veux t'amuser à calculer j'avais 39 lorsque je suis mort la 1ère fois. C'était en 52 av.J.C."

_"Vous avez donc 2111 ans."

_"Quelque chose comme ça en effet."

_"Moi j'ai 19 ans."

Cela déclencha un fou rire chez Jim, qu'il communiqua à ses deux camarades. Puis il arrêta de rire.

_"V'là ton motel."

Derek Hall entendit le camion se garer devant son motel. Il enfila un anorak et sortit voir qui arrivait, quand il sentit la présence d'un Immortel. Deux pour être exact. Il pensa donc à s'équiper de son épée. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'il reconnut Alfred de Glenmore. Celui-ci était descendu le premier de l'arrière du camion. Il ne reconnut pas l'autre Immortel, mais devina qu'il devait être l'élève d'Alfred.

_"Derek!"

_"Heu... Heureux de vous revoir, Glenmore."

Angleterre, 1740.

Cesarius chevauchait depuis trois jours à travers la campagne anglaise. Il arrivait dans un petit village d'une centaine d'habitants, et se mit à chercher une auberge pour passer la nuit, car le voyage depuis le château du duc de Glenmore l'avait épuisé. Il vit l'enseigne d'un établissement nommé "La taverne rouge". Pourquoi rouge? Cesarius décida d'éluder la question. Il entra et repéra un autre Immortel. L'aubergiste, un homme chauve et mal rasé aux yeux un peu fous, comme s'ils allaient sortir de leurs orbites, leva les yeux immédiatement sur lui, et passa un bras sous le comptoir. Sans doute pour prendre une épée, songea Cesarius. Il s'avança vers le gérant.

_"Tu peux laisser ton épée où elle est, tavernier."

_"J'espérais bien ne pas avoir à me battre contre vous, seigneur. Je m'appelle Derek Hall, je suis le patron de cet humble auberge. Vous êtes...?"

Cesarius était arrivé dans la région il y a une dizaine d'années et se faisait passer pour un noble chevalier du nom d'Alfred de Glenmore.

_"Je suis le seigneur Alfred de Glenmore. Tout ce que je veux, c'est à manger, à boire et une chambre. J'espérais trouver tout cela dans cet endroit."

_"Certes."

Derek l'installa à une table isolée du reste de la salle, et lui servit une soupe, ainsi qu'une chope de bière. Puis il vint s'asseoir en face de lui.

_"Dîtes-moi, seigneur, une fois vôtre repas terminé, vous n'avez pas l'intention de me défier?"

_"Je te l'ai déjà dit, je veux juste manger, boire et me reposer. Maintenant, cesse de m'importuner."

Cesarius trouva que la bière avait un goût étrange. Sa vue commençait à baisser.

_"Gredin! Tu m'as..."

_"Empoisonné, oui. Mais pitié ne jurez pas si fort, les clients pourraient vous entendre."

Maintenant il devait le sortir d'ici.

_"Encore un qui a trop bu. Aidez-moi à le sortir d'ici!"

Deux hommes vinrent l'aider à emmener le "duc" à l'extérieur. En remerciement, Derek prit deux pièces d'or dans la bourse de Cesarius et en donna une à chacun.

_"Merci. Je me charge du reste."

Une fois les deux hommes partis, Derek commença à détrousser Cesarius. Il ne lui laissa que son épée, car il ne voulait quand même pas qu'il meure. Tout le monde sait bien qu'un Immortel sans épée est un Immortel mort. Puis il le jeta dans une mare. Derek repartait vers son auberge, quand il eut un déclic. Glenmore allait peut-être vouloir se venger. Et il reviendrait. Cette fois, Derek ne pourrait échapper au combat. Il décida de retourner auprès de lui pour lui trancher la tête. C'était trop tard. Cesarius sortait de la mare, son épée à la main, bien décidé à s'en servir.

_"Je... Je ne voulais pas. Je vous jure que c'est la première fois que je détrousse un Immortel."

_"Pourquoi tiens-tu cette épée, alors? Tu revenais sans doute me dire au revoir?"

Le pantalon de Derek devint soudain tout humide.

_"Je vous demande pardon. J'avais peur que vous cherchiez à vous venger. Vous pouvez le comprendre, n'est-ce pas?"

_"Evidemment, que je peux le comprendre. J'aurais fait pareil à ta place. Et toi, si tu avais été à ma place, tu n'aurais pas comme une folle envie de me tuer??"

Cesarius leva son épée et se jeta littéralement sur Derek. Ce dernier était un piètre escrimeur. Cesarius le désarma en quelques coups. Derek était maintenant à genoux. Il pleurait.

_"As-tu une dernière chose à ajouter pour ta défense?"

_"Comprenez-moi, seigneur. Les soldats du duc nous prennent pratiquement tout ce qu'on a. Il faut bien nourrir la famille."

_"Quelle famille? Tu sais très bien que les Immortels ne peuvent pas avoir d'enfants."

_"Elle s'appelle Rebecca. Quand son mari est mort, je l'ai épousée et j'ai adopté ses trois enfants. Ils seraient tristes si jamais je venais à mourir."

Cesarius jugea que le pauvre aubergiste immortel faisait plus pitié qu'il n'était réellement méchant. Et puis, c'était à cause de ses soldats, il se sentait donc responsable.

_"Va. J'ai finalement décidé de te laisser la vie sauve."

_"Merci, mon seigneur. Dieu vous le rendra."

_"Mais à une condition! Tu vas partir avec toute ta famille loin d'ici. Si d'aventure je te revois en Angleterre, je n'hésiterai pas à te tuer."

Derek se releva et, sans demander son reste, déguerpit vers le village.

_"Qu... Qu'est-ce qui vous amène?"

_"Nous voulons juste manger, boire et dormir. Mais si ça me fait une légère impression de déjà-vu."

_"..."

_"Derek, je te présente Jim, mon compagnon, et Nelson, mon nouvel élève."

Derek conduisit le groupe à l'étage et leur fournit une chambre pour eux trois. Puis il se hâta de retourner dans sa boutique, sensiblement mal à l'aise à moins de 10 mètres de Glenmore. Nelson posa une question à son mentor.

_"Dîtes, sergent, pourquoi il vous a appelé Glenmore?"

Alors Cesarius leur raconta l'anecdote datant de 280 ans.

_"Vous changez souvent de nom?"

_"Tous les 20 ou 30 ans. Voire moins en cas de mort accidentelle."

_"Marco Cesario, c'est vôtre vrai nom?"

_"Le nom que je portais à ma naissance est Lucius Cesarius."

Le silence succéda à la réponse de Cesarius, Nelson n'ayant plus de questions à poser. Jim s'avança près de la fenêtre et scruta l'horizon.

_"Ca à l'air tranquille ici."

Puis l'écossais alla se coucher. Dix minutes passèrent pendant lesquelles Cesarius essayaient de trouver le sommeil. Nelson ressassait sa journée dans sa tête. Hägen, la hache, l'arrivée de Cesarius, la fuite en camion. Une question lui vint à l'esprit.

_"Comme je suis mort, je vais devoir changer d'identité?"

_"Pas nécessairement. D'après ce que tu m'as raconté, tous les gens qui te connaissaient et qui t'aimaient sont morts. Tu es un parfait inconnu."

Nelson repensa à sa famille, à ses amis. Il les avait tous perdus en l'espace de quelques jours. Tout ça à cause de cet Hägen. Pour la première fois de sa vie, il souhaitait la mort de quelqu'un. Ce quelqu'un, c'était Hägen. Il aurait aimé que Cesarius le tue dans le hangar. Il ne l'avait pas fait. Mais il aurait pû. En fait, ce qu'il aurait voulu, c'était que Cesarius n'intervienne pas. Hägen l'aurait décapité, et il serait à présent de l'autre côté avec ceux qu'il aimait, même s'il ne croyait pas trop à la vie après la mort. Pourquoi ne pouvait-il pas mourir? Pourquoi lui était Immortel et pas les autres? Il se demanda si dans 2000 ans il se souviendrait toujours d'eux. Nelson pensait à toutes ces choses. Mais Morphée finit par le rattraper.

Au petit matin, Derek sortit après avoir enfilé un anorak. Il avait demandé à la CPL de passer. Il avait recueilli deux soldats de l'Opposition. Ca allait lui rapporter beaucoup d'argent. Cette fois Glenmore n'allait pas pouvoir se venger. Il serait mort avant. Mais qu'est-ce qu'ils foutaient, les gars de la CPL? Il fallait venir avant que les prisonniers ne se réveillent. Cette fois, Derek n'avait pas pû les enfermer dans la chambre. Avec deux Immortels, il aurait été facilement repéré. Trop tard. Derek sentit un Immortel s'approcher. La porte de la chambre s'ouvrit et Nelson en sortit. Il était seul, au grand soulagement de Derek. Il pensa soudain à une chose. Le gamin était sans arme. Il ne pouvait pas se méfier de lui. Il n'intéressait pas la CPL, c'était un civil. Et son aura était puissante pour un nouveau. Il élabora un plan en toute vitesse.

_"Alors, petit, ta nuit s'est bien passée?"

_"J'ai connu des nuits plus tranquilles, mais en gros, ça s'est plutôt bien passé. J'ai pas arrêté de penser à ce que j'étais devenu. Ca fait bizarre de se dire qu'on ne peut pas mourir."

_"C'est vrai, on est tous passés par là. Tes amis sont toujours en train de dormir?"

_"Oui."

Il restèrent un moment côte à côte, sans dire un mot. Derek se dit que c'était le moment.

_"Je pensais à un truc, petit. Il te faut une arme."

_"J'y avais pas encore pensé."

_"J'ai tout un arsenal. Tu n'auras qu'à choisir celle que tu veux."

_"C'est gentil, mais pourquoi vous feriez ça?"

Merde, il se méfie. Glenmore a dû lui raconter l'histoire. Faut que je sorte une fausse excuse.

_"Tu sais, j'ai une dette envers Cesarius. En te donnant cette épée, c'est une manière de me faire pardonner le mauvais traitement que je lui ai infligé."

Sans rien dire, Nelson le suivit vers l'arrière-boutique. Là, Derek ouvrit un coffre rempli d'épées, sabres et autres armes tranchantes. Nelson en prit une au hasard.

_"Celle-ci m'a l'air pas mal. Je peux la prendre?"

_"Oui, tu peux. Mais celle-là est encore mieux. D'ailleurs, pour t'en convaincre, je vais te faire goûter sa lame!"

Derek essaya de décapiter Nelson d'un seul coup, mais celui-ci se baissa et sortit en courant de la boutique. Derek courut à sa suite. Il n'allait pas le laisser s'en sortir aussi facilement. Un buzz, plus puissant que celui de Nelson, le stoppa net dans sa course. Cesarius se plaça dans l'encadrement de la porte de la boutique.

_"Tu t'es dit que ce serait facile d'avoir sa tête, n'est-ce pas? Tu n'as pas pensé que j'allais t'en empêcher?"

_"Après, les soldats de la CPL vous auraient déjà emmené, toi et ton copain!"

_"Tu nous a vendus!?!"

_"Désolé... Business is business, enfin vous voyez ce que je veux dire."

_"Ce que je vois c'est que tu n'as plus de famille à nourir. Rien ne m'empêche de te tuer aujourd'hui."

_"Vous savez quoi? Je n'ai jamais eu de famille à nourir!"

C'en était trop. Cesarius sortit son glaive et passa à l'attaque. Derek contra les coups. Il avait fait de gros progrès depuis la dernière fois. De toute façon, il ne pouvait que s'améliorer. Cesarius et Derek portaient chacun des coups d'épée que l'autre parait à chaque fois. Cesarius réussit tout de même à entailler la jambe gauche de Derek, qui perdit alors de sa mobilité.

_"Alors, c'est tout ce que tu sais faire?"

_"Je suis sûr que vous ne connaissez pas cette botte."

Derek fonça sur Cesarius en levant son épée en direction de son cou. Cesarius tenta de parer mais son glaive ne rencontra que le vide. L'arme de Derek était passée dans son autre main. Il enfonça la lame de son épée dans le ventre de Cesarius, qui fut surpris par l'habileté et la rapidité du geste de Derek. Ce dernier profita de la surprise pour porter un coup fatal à la gorge de son adversaire, mais Cesarius roula en arrière et se remit en position de combat. Il devait en finir maintenant. Il fit tournoyer son glaive et se rua sur Derek. Le mouvement que faisait la lame de Cesarius le désorientait, il perdait peu à peu son sang-froid, tant et si bien qu'il finit par faire tomber son épée. D'un coup de pied, Cesarius le fit se mettre à genoux. Derek pleurait, comme la dernière fois.

_"Tu cherches à m'apitoyer. Mais cette fois ça ne marchera pas. Tu es fini, Derek!"

Puis saisissant son glaive tel un poignard, il trancha la tête de Derek. Nelson avait regardé tout le combat et allait assister pour la première fois à un quickening. Le ciel s'assombrit tout d'un coup, comme si la nuit retombait soudain. Les vitres de la boutique éclatèrent. C'est à ce moment que les éclairs apparurent. Ils envahirent le motel, détruisant tout ce qui était métallique. Le corps sans tête de Derek luisait, les éclairs en sortaient pour aller frapper Cesarius, non sans faire quelques détours par les lampes de la boutique, qui s'éteignèrent pour de bon. Cesarius avait posé un genou à terre et s'appuyait sur son glaive. Il recevait de plein fouet la décharge qui aurait foudroyé n'importe quel mortel. Puis le quickening cessa. Le ciel redevint gris et le silence se fit. Cesarius se releva, prit l'épée de Derek et la donna à Nelson.

_"Prends cette épée. Désormais, c'est la tienne. Pour une fois, Derek ne l'avait pas trop mal choisie."

_"Merci."

Contrairement à ce qu'il pensait, il ne fut presque pas étonné par le spectacle que lui avait offert le quickening de Derek Hall. Tout juste admiratif. Mais pas surpris, encore moins effrayé. Comme s'il s'y attendait. Il porta son attention sur l'épée de Derek, son épée. D'après Cesarius, c'était une épée qu'utilisaient les soldats anglais au 13ème siècle. La lame était plutôt courte, mais néanmoins plus longue que celle de Cesarius.

_"Prends-en soin. Ce sera ta seule amie. Elle n'est pas trop lourde, elle te conviendra parfaitement. Vu ton physique, tu devras jouer sur la vitesse plus que sur la force."

Soudain un grondement se fit entendre. Une ombre recouvrit la vallée. Ce n'était pas un orage. Nelson se tourna vers le sud, en direction des montagnes de l'Alaska. Un gigantesque vaisseau de couleur bleue foncée, aux flancs décorés de flammes jaunes et rouges.

_"Le Shooting Star!"

Cesarius connaissait ce vaisseau. Jim les rejoignit à ce moment-là. Il jeta un coup d'oeil vers le vaisseau, puis suggéra quelque chose.

_"A mon avis, vaudrait mieux pas traîner dans les parages."

_"Le quickening a mis le camion hors-service. On est bloqué ici, les gars."

Le Shooting Star était le vaisseau le plus important de la flotte du CPL. Et Cesarius connaissait parfaitement le commandant de bord. Le vaisseau se posa à une centaine de mètres du motel. Des soldats en descendirent, armés jusqu'aux dents. A leur tête, un homme brun, aux yeux plein de malice. Un Immortel, officier de la CPL comme Hägen. Il les menaçait d'un pistolet. Le même que celui de Hägen.

_"Les mains en l'air, que personne ne bouge."

L'Immortel semblait heureux de trouver deux de ses congénères parmi les prisonniers.

_"Lequel d'entre vous est Derek Hall?"

Cesarius répondit.

_"Le type allongé là-bas. Celui qui n'a plus de tête."

L'Immortel considéra quelques secondes le corps de Derek.

_"Pas grave. De toute façon j'aime pas les balances. Suivez-moi."

Les soldats les conduisirent vers le vaisseau. Cesarius sentit la présence d'au moins deux autres Immortels dans le vaisseau. L'un d'eux attendait devant l'embarcadère. Cesarius le reconnut tout de suite. Son vieil ami... et rival. Celui-ci prit la parole.

_"Alors, Cesarius, on se retrouve une fois de plus."

_"J'espère que c'est la dernière fois qu'on se rencontre."

_"J'espère aussi."

Puis il s'adressa à son lieutenant, l'autre Immortel.

_"Mr. Andrews, mettez-les aux fers. Confisquez leurs armes. Nous les emmenons à Mr. Esperanza."

_"A vos ordres, mon commandant."

Andrews fit monter les prisonniers dans le vaisseau et le commandant les suivit. Puis le vaisseau décolla et repartit d'où il était venu, de l'autre côté des montagnes de l'Alaska.

Fin du 2ème épisode

 

Episode 3:

A bord du Shooting Star

Il s'appelle Nelson Fullman. Il est né en 2001 à Fairbanks, dans la vallée glacée du Yukon, en Alaska. Il est mort, tué par le commandant Hägen. Depuis il est Immortel. Cesarius, un Immortel de 2000 ans, l'a pris sous son aile. Après qu'il ait assisté pour la première fois à un quickening, Nelson et ses amis, Cesarius et Jim, sont faits prisonniers par la CPL et emmenés à bord du Shooting Star.

 

Le Shooting Star faisait route vers Buenos Aires, où se trouvait le quartier général de la CPL, là où siégeait Esperanza. Le commandant Marconi avait demandé au pilote Robert Marnac'h de pousser les réacteurs à pleine puissance, car il voulait se dépêcher d'amener ses proies à son chef. Robert pouvait le comprendre. Il était rare que le commandant capture un Immortel, et cette fois il en tenait deux.

Les soldats jetèrent les deux Immortels dans une cellule. Jim, lui, fut placé dans une cellule voisine. Celle-ci était déjà occupée. Son nouveau camarade était couvert de haillons, était sale, mal rasé. Avant la guerre, Jim aurait jugé qu'il fut un clochard. Mais de nos jours, les hommes comme lui couraient les rues. Celui-ci avait même plutôt de la chance, car la plupart des hommes comme lui couraient les rues à l'état de cadavres. L'inconnu ouvrit la bouche et Jim s'attendit à entendre quelque braillement rauque.

_"'Lut cam'rade! 'Sieds-toi donc!"

_"J'aurais pas attendu ton autorisation, tu sais, vieux."

_"P'rquoi vieux? J'ai que 34 ans!"

_"Façon de parler."

_"J'suis Richard Dikkins! Mais on m'appelle Bug!"

_"Enchanté... Bug. Moi c'est James MacHendry. Mais on m'appelle Jim."

Bug sortit une bouteille de whisky et la tendit à Jim.

_"T'en veux?"

_"Non merci. On donne de l'alcool aux prisonniers ici?"

_"Non. Je l'ai piquée à la cantine."

_"Ah d'accord!"

_"Vous croyez qu'on va s'en sortir, sergent?"

_"Peut-être."

Ce furent les deux seules qu'échangèrent Nelson et son maître durant l'heure qui suivit leur incarcération. Nelson essayait de dormir, n'ayant rien de mieux à faire. Une douleur fulgurante à la tête l'en empêcha, juste avant que Andrews, flanqué de deux soldats, n'ouvre la porte de leur cellule.

_"Toi, le gros moustachu. Le commandant veut te voir. Suis-moi."

Cesarius se leva et suivit l'homme de main de celui qui était devenu commandant de la flotte de la CPL. Andrews le conduisit à la cabine de Marconi. Celui-ci, ayant senti leur arrivée, leur ouvrit la porte avant même qu'ils n'aient à signaler leur présence. Andrews salua son supérieur.

_"Mon commandant."

_"Laissez-moi seul avec le prisonnier, Mr. Andrews. Rompez!"

_"Bien, mon commandant."

Cesarius pénétra sans aucune crainte dans l'antre de son ennemi juré.

_"Installe-toi, vieux frère. Fais comme chez toi."

_"Je m'attendais à un tel accueil."

_"Tu parles de maintenant ou bien de ton arrestation de tout à l'heure?"

Sans répondre à la question, Cesarius prit place dans le fauteuil de son hôte. Depuis la construction du vaisseau, il était la seule personne à le faire en dehors du commandant. Le commandant ne fut nullement offensé par ce geste, bien au contraire, et s'asseya sur son lit.

_"Alors, Cesarius, comment se fait-il que je te retrouve en plein coeur de l'Alaska, perdu dans un motel tenu par un Immortel véreux?"

_"Beau temps, n'est-ce pas?"

_"Ne commence pas à te foutre de ma gueule, Cesarius! N'oublie pas que cette fois c'est toi le prisonnier."

_"Tu sais très bien que jamais je n'oserais porter atteinte à ton image, Karnus, mon frère."

Gergovie, Pays Arverne. 52 av.J.C.

La bataille venait de s'achever. Elle avait tourné à l'avantage des fiers guerriers gaulois. Les troupes romaines de Jules César venaient de subir leur plus cuisante défaite depuis le début de la campagne des Gaules. Les cadavres jonchaient le sol. Parmi eux, une main bougea. Puis l'autre. Puis le reste du corps se redressa. Cesarius croyait pourtant avoir été tué par ce grand Gaulois qui lui avait asséné un coup d'épée derrière la tête, fendant son casque et son crâne en deux. Bénissant Mars, le dieu de la guerre, qui avait eu la bonté de le protéger, il se leva et contempla le spectacle qui s'offrait à ses yeux. Partout ou son regard portait, des cadavres. La plupart romains, mais certains étaient d'anciens guerriers locaux. Tous morts, sauf lui. Cesarius eut soudainement terriblement mal au crâne. Sans doute sa blessure, se dit-il, mais quand il porta la main derrière sa tête, il fut surpris de ne distinguer aucune blessure. Même pas une bosse.

_"Décurion?"

C'était Karnus, un de ses hommes. Ils étaient ensemble depuis le début de la guerre.

_"Karnus, je suis content de voir que tu as survécu toi aussi. Je croyais être mort."

_"Moi aussi. J'avais pourtant reçu un lance en plein coeur."

_"A croire que nous sommes revenus à la vie. Aïe! Mon mal de tête me revient.

_"A moi aussi, décurion!"

Un homme se planta devant eux. Un légionnaire romain. Il avait abandonné sa cuirasse mais tenait son glaive à la main.

_"En effet, vous êtes effectivement revenus à la vie. Claudius Aulanus. Je ne vous dirai pas que c'est un miracle que vous soyez en vie, puisque c'est tout à fait normal. Au fait, pour la petite migraine, ça va vite se passer, on s'y fait très vite."

_"De quoi parles-tu, soldat?"

_"Je vous parle de ce que vous êtes devenus au cours de cette bataille."

_"Je suis Flavius Karnus, légionnaire romain. Et voici le décurion Lucius Cesarius."

_"Désormais vous n'êtes plus des légionnaires. Désormais vous êtes des Immortels."

_"Dans cette vie, je suis le commandant Angelo Marconi."

_"Angelo... Quel beau prénom. Tu n'as pourtant rien d'un ange."

_"N'oublie pas qu'à une époque, tu étais aussi loin d'être un ange que moi."

_"Le monde change, Karnus. Le monde change mais tu restes le même."

_"Nous règlerons nôtre différend plus tard. Parlons plutôt de ce gosse que tu as recueilli. Comment s'appelle-t-il déjà?"

_"Nelson."

_"Ah oui, Nelson. Quel âge a-t-il?"

_"19 ans. Il est Immortel depuis hier seulement."

Marconi n'en crut pas ses oreilles. L'aura de ce Nelson était très puissante. Trop même pour son âge. Des Immortels comme ça, il en naissait 1 tous les 500 ans.

_"Tu rigoles?"

_"Pas du tout."

_"Ca veut dire..."

_"Qu'il a de grandes chances de finir parmi les derniers. Si on ne l'arrête pas avant qu'il aie atteint une décennie d'Immortalité, il sera devenu presque imbattable. Et si en plus, il se met à chasser les têtes..."

_"Jamais il n'atteindra 10 ans d'Immortalité."

_"Qu'est-ce qui te fait dire ça?"

_"Contrairement à vous autres de l'Opposition, à la CPL, on a les moyens de faire des statistiques. On a remarqué un truc."

_"Quoi donc?"

_"Les hostilités n'opposent pas que nos camps respectifs. Le nombre de duels a également augmenté. Le nombre d'Immortels a fortement diminué ses six derniers mois."

_"C'est inquiétant, en effet."

_"Je ne te le fait pas dire."

_"On passe nôtre vie à l'attendre, et quand elle arrive, on n'ose pas y croire."

_"C'est vrai. Moi aussi j'ai du mal à me faire à l'idée que l'heure de la Rencontre approche."

_"Bug?"

_"Hmm?"

_"Je peux te poser une question?"

_"Hmm."

_"Tu peux me dire par quel moyen t'as pu aller piquer une bouteille à la cantine?"

Bug s'était endormi. Il avait attendu plusieurs heures que Jim décroche un mot. En vain. Un vrai mur. Comme si quatre ne suffisaient pas. Maintenant qu'il avait trouvé le sommeil, l'autre commençait à désserrer les lèvres.

_"Très simple. J'ai la clé de la cellule."

Jim se crut dans un mauvais film burlesque. Ce type avait la clé et il s'en servait pour picoler. Inimaginable. Quelques secondes passèrent.

_"J'peux te poser une autre question?"

_"Hmm."

_"POURQUOI TU NOUS SORT PAS DE LA, ESPECE DE CRETIN?"

_"Pour aller où? Une fois sortis de la cellule, tu connais un moyen de sortir du vaisseau?"

_"Ben... non."

_"Alors, fais comme moi, dors."

_"Revenons à nôtre différend, s'il te plaît."

_"Comme tu voudras, Cesarius."

_"On va le régler quand?"

_"Je vais t'emmener auprès d'Esperanza. Ensuite je lui demanderai l'autorisation de te garder auprès de moi. De là, nous pourrons régler nos affaires en toute liberté. Ca ne te dérange pas d'avoir à attendre quelques jours de plus?"

_"Pfff! Ca fait 2000 ans que j'attends, je ne suis plus à quelques jours près."

Pays Arverne. 51 av.J.C.

Un an déjà. Un an depuis qu'Aulanus les avait trouvé sur le champs de bataille et leur avait appris ce qu'ils devaient savoir. Depuis ce jour, ils avaient tous les trois déserté l'armée romaine. Officiellement, ils avaient été tués à Gergovie. Cesarius repensait à tout cela tandis qu'il se baignait dans la rivière. Karnus était resté s'entraîner auprès d'Aulanius. Mais en les quittant, Cesarius avait eu un mauvais pressentiment. Depuis qu'il était Immortel, Karnus avait changé de comportement. A la guerre, Karnus était un vrai tueur. Cesarius avait peur que, devenu Immortel, il ne reste un tueur en dehors des batailles. Soudain, ce que Cesarius craignait le plus se produisit. Des éclairs envahissaient le ciel. Il se dépêcha de se rhabiller et courut jusqu'à ses compagnons.

Aulanius gisait sur le sol. Sa tête avait roulé jusque sous un buisson. Karnus avait eu le temps de reprendre des forces depuis le quickening. Il souriait, ce qui effraya Cesarius.

_"Pourquoi?"

_"Il a voulu me défier pour se rendre compte de mes progrès. C'était une fois de trop. J'étais sûr d'être au point. Il n'a pas voulu me croire. Maintenant, il est bien obligé."

_"Tu n'étais pas obligé de le tuer..."

_"Non. Mais excuse-moi. Je me suis laissé emporter. J'ai fini par me prendre au Jeu."

_"Il ne méritait pas de mourir. Sans lui, et sans tout ce qu'il nous a appris, nous serions peut-être déjà morts. Tu en as conscience?"

_"Oui. C'est pourquoi je ne l'oublierai jamais, d'autant plus que c'est ma première victoire."

_"Jamais je ne te le pardonnerai."

_"Tu ne vas quand même pas te fâcher pour une malheureuse décapitation? On est toujours amis."

_"On est amis, et c'est pour ça qu'aujourd'hui je te laisse la vie sauve. Pars loin. Je ne chercherai pas à te retrouver, mais si un jour le hasard fait que nos chemins se recroisent, je n'hésiterai pas à venger la mort de mon maître."

Karnus ne s'attendait pas à une telle réaction de la part de son ami. La mort dans l'âme, il tourna les talons et partit.

Jim porta un léger derrière la tête du garde qui faisait sa ronde. Puis il déposa le corps dans la cellule et ferma derrière lui. Il avait réussi à convaincre Bug d'utiliser la clé. Il prévoyait de saboter les circuits contrôlant le système de navigation du vaisseau, afin de le forcer à atterrir. Il se fraya un chemin vers la salle des machines. C'est là que se trouvaient tous les circuits de contrôle du Shooting Star. Il étudia longuement l'installation, mais ne sut que faire. Il avait besoin de Cesarius. Celui-ci avait collaboré à l'élaboration du vaisseau 15 ans auparavant. Il ne pensait pas alors qu'il allait se retrouver prisonnier à bord du vaisseau en question. En effet, il devait à l'origine servir pour l'US Air Force. La voix de Bug se fit entendre.

_"'Tain chiotte!"

_"Quoi encore?"

_"On est grillé!"

Jim se retourna et vit Andrews, son pistolet à la main, qui les menaçait.

_"L'ordinateur central a signalé des intrus dans la salle des machines. J'ai tenu à le vérifier par moi-même."

Bug parut soulagé.

_"'Tain, Peter, tu m'as foutu les j'tons!"

Andrews rangea son arme dans son étui.

_"Alors, Bug, tu me présentes pas?"

Nelson se morfondait, recroquevillé au fond de sa cellule. Il attendait le retour de son maître. C'était la première fois qu'il se retrouvait seul depuis qu'il était Immortel. Il s'attendait à tout moment à voir arriver Andrews qui viendrait pour lui trancher la tête. Il sentit alors un Immortel s'approcher. A son grand soulagement, les soldats ramenaient Cesarius dans sa cellule. Cette fois, Andrews n'était pas là. Les soldats jetèrent le Romain au sol et fermèrent la porte à double tour.

_"Content de vous revoir vivant, sergent."

_"Merci."

Cesarius repensa à sa conversation avec le commandant. Dans quelques jours, l'un des deux serait mort. Il sentait que ce serait lui.

_"Content de te revoir, Nelson. Content de te revoir..."

_"Bug, tu as bien compris comment désactiver le système de navigation?"

_"T'inquiète!"

_"Ok. Jim, tu viens avec moi, on va aller chercher tes deux amis. Plus un à moi. On profitera de la diversion causée par "l'accident"."

Jim n'en revenait toujours pas. Andrews trahissait son commandant. Il se dit qu'il jouait vachement bien la comédie, car tout le monde croyait qu'il était dévoué corps et âme à Marconi. Jim le suivit à travers les couloirs du vaisseau. Quelques minutes plus tard, une alarme retentit dans le vaisseau.

_"Alerte! Alerte! Défaillance dans le système de navigation. Alerte! Alerte! Défaillance dans..."

_"La vache! Il a fait vite. Comme quoi il est pas si con. Jim, vous avez la clé des cellules?"

_"Oui."

_"Alors allez chercher vos amis. Moi je vais récupérer leurs armes." Et ne vous faîtes pas remarquer."

_"Ok."

Jim et Andrews se séparèrent et continuèrent leur course chacun de leur côté.

Les écrans de contrôle s'affolèrent. C'était la première fois que celà arrivait. Robert ne savait pas quoi faire. A l'affolement vint s'ajouter une terrible migraine. Le commandant approchait. C'était complet.

_"Mr. Marnac'h. Bilan de la situation."

_"On signale un problème dans le système de navigation. Je suggère un atterrissage forcé, le temps que les ingénieurs trouvent la source du problème et y remédient."

_"Je n'aurais pas suggéré mieux. Faîtes atterrir le Shooting Star."

Marnac'h passa en mode de pilotage manuel et fit atterrir le vaisseau avec ses yeux comme seuls instruments de navigation. Le Shooting Star se posa sans problème au milieu d'une étendue de sable.

_"Mr. Marnac'h! Essayez de déterminer nôtre position."

_"Bien, mon commandant."

Robert Marnac'h eut le réflexe de consulter la carte qui indiquait à tout moment la position du vaisseau où qu'il soit dans le monde. Mais cell-ci était H.S, comme tout le reste. Il dut alors se référer à son sens de l'orientation et à sa logique.

_"Mon commandant! Etant donné que nous volions depuis bientôt trois heures et que le désert s'étend à perte de vue tout autour du vaisseau... Je pense ne pas me tromper en affirmant que nous avons échoué en pleine Vallée de la Mort, mon commandant."

_"Je ne pense pas que vous ayez tort, Mr. Marnac'h. Faîtes venir Mr. Andrews."

_"Mon commandant, je pensais qu'il était avec vous. Il m'a dit qu'il devait vous rejoindre. Vous ne l'avez pas vu?"

Effectivement, le commandant Marconi n'avait pas revu Andrews depuis qu'il lui avait amené Cesarius dans sa cabine. Où pouvait-il être?

_"Mon commandant!"

Un soldat arrivait en courant au poste de pilotage.

_"Qu'y a-t-il, soldat?"

_"Les prisonniers se sont échappés de leurs cellules."

_"Vous deviez pourtant les surveiller."

_"Oui, mon commandant."

_"Vous avez donc échoué."

_"Oui, mon commandant."

_"Aujourd'hui, mon vaisseau est tombé en panne. Mon second est introuvable. Vous pouvez comprendre que je suis à cran. Alors, cette évasion, c'est un peu la goutte d'eau qui fait déborder le vase."

Le soldat déglutit. Sans dire un mot, Marconi sortit son arme et tira sur le pauvre soldat.

_"Désormais, prévoyez un gilet pare-balles pour m'annoncer des mauvaises nouvelles."

Puis il repartit vers sa cabine, pendant que des soldats évacuaient le corps de leur défunt camarade.

_"Je veux qu'on retrouve les prisonniers coûte-que-coûte!"

Fin du 3ème épisode

 

 

Episode 4:

Rivalité Immortelle

Il s'appelle Nelson Fullman. Il est né à Fairbanks, Alaska, en 2001, dans la vallée du Yukon. Il est Immortel depuis sa rencontre avec le viking Hägen. Cesarius, le soldat Romain, l'a recueilli et a décidé de le former. Mais Nelson, Cesarius et Jim, son compagnon de route, ont été faits prisonniers par le commandant Marconi, alias Karnus, le rival de Cesarius. Mais ils trouvent une aide inespérée en la personne de Andrews, l'homme de main Immortel de Marconi, et Bug, son complice. Bug parvient à faire atterrir de force le vaisseau au milieu de la Vallée de la Mort.

Quelques minutes plus tôt

Cesarius et Nelson entendirent des bruits de pas. A leur grande surprise, ce ne furent pas les hommes de Marconi, mais Jim qui ouvrit la porte.

_"Vous vous demandez sûrement comment j'ai fait, mais pour l'instant, faut juste qu'on se tire d'ici. Et vite."

Il laissa passer Nelson et Cesarius et Jim devant lui, puis il leur emboîta le pas.

Marconi ne savait plus quoi faire. Il préssentait que les évasions, la panne et la disparition d'Andrews était liées. Il aurait dû décapiter cet Anglais il y a deux ans, alors qu'il menait un groupe de résistance. Il avait préféré se montrer clément, et l'avait nommé son nouveau second. Il est vrai que Peter Andrews était un fin stratège. Et un excellent tireur d'élite. Ses qualités s'étaient montrées plusieurs fois indispensables, et jusque-là, Marconi n'avait pas eu à se plaindre de ses services. Bien au contraire. Andrews lui obéissait, car il savait que la vengeance de son commandant serait terrible. Et aussi parce qu'il lui devait la vie. Oui, Andrews était vraiment malin. Il savait que la présence de Cesarius allait focaliser toute l'attention de Marconi et l'empêcher de faire quoi que ce soit contre lui. Il avait su saisir sa chance. Marconi prit son épée. Puis il adressa un ordre à ses hommes, par intercom. Il venait de prendre une décison. Désormais, Marconi allait jouer le tout pour le tout.

_"Soldats, vous allez prendre les navettes de secours et rejoindre la base la plus proche. Je veux qu'aucun d'entre vous ne reste dans le vaisseau. Evacuez le vaisseau!"

Personne ne devait assister à un duel entre Immortels. Il devait rester seul. Comme en 1837, à l'époque où il avait traqué deux Immortels à bord d'un navire français qui traversait l'Atlantique. Mais cette fois, il y en avait trois. Il allait avoir besoin de Marnac'h. Ce n'était qu'un novice. Mais il ne serait pas de trop.

Les soldats obéissaient aux ordres de leur commandant. Ils évacuaient le vaisseau à bord des navettes de secours. Il y en avait un vingtaine. Largement suffisant pour le nombre d'hommes qu'il y avait à bord. Il rejoignit le poste de pilotage. Marnac'h, comme tous les autres, avait fait son sac et allait partir.

_"Que faîtes-vous, Mr. Marnac'h?"

_"J'obéis à vos ordres, mon commandant."

_"Vous ne partez pas."

_"Mon commandant?"

_"J'ai besoin de vous. Devinez pour quoi?"

_"C'est-à-dire que..."

_"Il y a un début à tout, Mr. Marnac'h."

Cesarius guidait Jim et Nelson vers les salles d'évacuation. Mais il sentit soudain un Immortel approcher. Nelson se plaignit d'une douleur à la tête. Ils rencontrèrent Andrews au détour d'un couloir. Cesarius recula inconsciemment.

_"C'est bon, je suis de vôtre côté. J'ai récupéré vos armes."

Il donna leur épée à Cesarius et Nelson, et les fusils et le pistolet à Jim et à Cesarius.

_"On ne va pas pouvoir partir tout de suite. Tout le monde évacue, sur ordre de Marconi. Va falloir attendre qu'il n'y ait plus personne."

_"Tout le monde s'en va?"

_"Tout le monde sauf Marconi et Marnac'h, le pilote."

_"Pourquoi le pilote reste ici."

_"Parce que c'est un Immortel."

Marconi laissa le pilote choisir son épée. Robert Marnac'h choisit une épée à pommeau en argent frappé d'un blason qu'il ne put reconnaître. Marconi n'avait encore jamais vu cette arme dans l'arsenal. Et comme par hasard, Marnac'h prenait celle-là. Marconi décida de ne rien dire. Ils partirent tous les deux à la recherche des prisonniers.

Parmi les fugitifs, tout le monde cherchait un moyen de s'en sortir. Cesarius prit la parole.

_"Bon, voilà ce qu'on va faire. Nelson viendra avec moi. Jim, tu retourneras avec Bug et Mr. Andrews dans la salle des machines."

_"Pourquoi faire, sergent?"

_"On va faire sauter le vaisseau."

Tous reculèrent d'un pas, étonnés de la décision. Andrews comprit les intentions de Cesarius.

_"Si le vaisseau explose, Marconi ne pourra nous poursuivre. C'est une bonne idée."

_"Euh... Sergent?"

_"Oui, Nelson?"

_"Pourquoi je dois venir avec vous?"

_"Marconi sera avec son pilote. C'est pourquoi j'aurai besoin de toi. Maintenant écoutez-moi tous. Je vais aller combattre Marconi et Nelson me prêtera main forte. Vous autres, déclenchez un incendie dans le vaisseau, puis retournez à la salle d'évacuation. Nous vous rejoindront."

Ils se mirent d'accord pour éxécuter ce plan, puis ils se séparèrent.

Marconi traversait le hangar où l'on entreposait les vivres, les munitions, les pièces de rechange en cas de problème sur le vaisseau. Le Shooting Star aurait pu être réparé sans problème, mais Marconi avait décidé d'en finir une bonne fois pour toutes avec son rival. C'est pourquoi il avait fait partir tous ses hommes. Marnac'h et le commandant s'arrêtèrent net dans leur course. Des Immortels approchaient. Cesarius et son élève se présentèrent à l'autre bout du hangar.

_"Finalement, on attendra pas jusqu'à Buenos Aires."

_"Entièrement d'accord."

Nelson observa longuement le pilote du vaisseau. Puis que Cesarius allait se battre contre Marconi, il se doutait bien qu'il allait avoir à faire avec lui.

_"Sergent, vous ne voulez tout de même pas que je me batte contre lui. Vous ne m'avez encore rien appris."

_"Et je n'aurais sans doute pas le temps de t'apprendre grand chose. Essaie de reproduire ce que tu as vu quand je me suis battu contre Derek. Je sais que tu peux y arriver. Fais-moi confiance."

En disant cela, Cesarius espérait ne pas se tromper. Nelson avait un énorme potentiel, c'est vrai, mais il se demanda si ce serait suffisant. Marconi rassura son adversaire.

_"Ne t'inquiète pas, petit. Robert Marnac'h n'a jamais combattu non plus. Maintenant, Cesarius, à nous deux!"

Marconi empoigna son glaive et Cesarius fit de même. Le sergent ôta sa casquette et sa chemise. Cesarius était très fort et rien ne devait le gêner dans son combat. Puis l'un comme l'autre se mit en posture de combat. Et enfin, le combat commença. Leur affrontement les entraînement les conduisait vers le fond du hangar. Bientôt ils avaient disparu derrière des caisses. Nelson et Marnac'h demeuraient immobiles au milieu du hangar, écoutant le bruit des lames qui s'entrechoquaient. Nelson pensa aux paroles de son maître. Puis il prit son épée en main et se lança sur le pilote en hurlant. Celui-ci ne dut compter que sur ses réflexes pour éviter la décapitation. Mais il ne sortit pas son épée.

_"Je ne veux pas me battre avec toi! Arrête!"

Nelson s'arrêta donc.

_"Nous avons pourtant autant de chances l'un que l'autre. Pourquoi refuses-tu de combattre?"

_"Nous ne sommes pas ennemis."

Jusque-là, Nelson était comme sur un petit nuage. Il pensait que Marnac'h était un méchant, comme Derek et Marconi. Il n'avait pas pensé une seconde que son adversaire pouvait être différent de son supérieur.

_"Tu..."

Nelson ne savait quoi répondre.

_"Je parie que la CPL a massacré toute ta famille. Il m'est arrivé la même chose. Je suis mort et Marconi m'a recueilli. Mais je ne fais que piloter, jamais je n'ai cautionné ses agissements. Alors, pitié, range ton épée."

La minute qui suivit parut une éternité pour Nelson. Il se rendit compte qu'il avait combattre un Immortel, et qui en plus ne lui avait rien fait.

_"Laisse-moi me joindre à vous, s'il te plaît."

Nelson réfléchit. Le succès de leur évasion reposait sur ses épaules. Devait-il croire le pilote et le laisser partir?

_"On doit se rejoindre à la salle d'évacuation. Allons-y."

Il était sur le point de partir mais son attention se reporta sur les bruits du duel. Il avait cessé. Nelson pensa un moment que l'undes deux était mort, mais il n'y avait pas eu de quickening. Il distingua des paroles.

_"Tu t'appelles Robert, je me trompe?"

_"Robert Marnac'h. Et toi?"

_"Nelson. Nelson Fullman. Pars devant, je te rejoins."

_"Alors Karnus, où te caches-tu? Cette fois, rien ne peut interrompre nôtre duel, alors viens!"

Un bruit en hauteur attira son attention. Il leva les yeux et vit Karnus. Celui-ci sauta de l'empilement de caisses et tenta de décapiter Cesarius au passage. Mais le sergent fut plus rapide, et c'est le commandant qui fut touché à la cuisse. Cette blessure le fit rater sa réception et il tomba lourdement sur le sol. Cesarius lui porta alors un second coup mais Marconi le para et entailla le ventre de Cesarius, qui recula, tenaillé par l'intense douleur que cette blessure lui infligeait. Marconi se releva et grimpa à une échelle. Cesarius le suivit. Arrivés en haut, les deux anciens légionnaires romains se lancèrent dans un nouvel échange de coups, tous plus rapides les uns que les autres. Finalement, Cesarius trouva la faille dans la défense de son adversaire et parvint à enfoncer sa lame profondément dans la poitrine de Marconi, qui lâcha son épée et tomba raide mort. Après avoir porté le coup, Cesarius recula, mais il avait mal évalué la distance entre lui et le bord de la plate-forme. Il tomba arrière et s'écrasa lourdement en bas de la plate-forme. Nelson, qui avait suivi tout le combat du bas, accourut vers son maître.

_"Sergent!"

_"Nelson, qu'est-ce que tu fais encore ici? Et Marnac'h?"

_"Il a décidé de laisser tomber son commandant."

_"Je l'aurais parié. Les autres ont accompli leur mission?"

_"Je ne sais pas."

_"Rejoins-les le plus vite possible."

_"Mais enfin, sergent, vous êtes paralysé. Marconi va revenir à la vie et va vous tuer."

_"Ne t'inquiète pas pour moi, Nelson. J'ai encore de la ressource. Et si je meurs, le seul regret que j'aurai, ce sera de ne pas avoir pu t'enseigner quoi que ce soit."

_"Sergent..."

Nelson se mit à pleurer. Il ne le connaissait que depuis deux jours, mais il se sentait triste malgré tout. Encore un ami qui disparaît.

_"Ne pleure pas, Nelson. Tu es Nelson Fullman, l'Enfant du Yukon. Ne l'oublie jamais et traverse les siècles."

Ils restèrent là un moment sans rien dire. Nelson ne pouvait se résoudre à abandonner son maître. Une larme se forma au coin de l'oeil de Cesarius.

_"Jim sait quoi faire dans le cas où je ne survis pas à ce combat. Fais-lui confiance. Et maintenant fous le camp!"

_"Au revoir, sergent."

_"Adieu."

_"Quels adieux touchants! Range ton mouchoir et reprends ton épée, Cesarius!"

Marconi s'était réveillé. Il commença à descendre l'échelle. Nelson ramassa le glaive de Cesarius et le lui donna. Puis il s'enfuit. Maintenant, il devait laisser le temps aux autres de partir. Si le vaisseau explose, un quickening ne fera qu'amplifier l'explosion. Il se relva difficilement. Marconi était déjà arrivé en bas. Il s'avança au devant de Cesarius et attendit.

_"J'aurais des scrupules à tuer un infirme. Je te laisse te reposer un peu."

_"Monsieur est trop bon."

_"Ne te méprends pas, si je te laisse cet avantage, c'est parce que tu m'as épargné il y a 2000 ans."

_"Tout ça ne serait jamais arrivé si tu n'avais pas tué Aulanus."

_"Pff! Laisse-moi rire! Et prépare-toi à le rejoindre!"

Marconi attaqua de nouveau. Cesarius tenta de contrer ses assauts, mais il était encore trop faible, et sa chute avait porté atteinte à sa mobilité. Marconi, d'un coup bref, fit voler l'épée de Cesarius, puis le fit se mettre à genoux. Il passa derrière lui et leva son glaive, la lame à la verticale. Comme on éxécutait les soldats dans les Légion de César.

_"Je suis obligé de reconnaître ma défaite."

_"Ca fait bizarre. Depuis 2000 ans, nous nous combattons, et aujourd'hui, cette rivalité va prendre fin."

_"Tu le regrettes, Karnus?"

_"Ne crois pas que je vais t'épargner, Cesarius. Mais c'est vrai que tu me manqueras."

Marconi planta la lame de son glaive dans la nuque de Cesarius. Avant que sa tête se détache de son cou, Cesarius sentit une larme tomber sur lui. Puis Marconi trancha la tête de Cesarius. Au même moment, une explosion se déclencha dans la salle des machines. Un éclair frappa Marconi alors que le bruit de l'explosion se faisait entendre. Puis un second. Plusieurs caisses volèrent en éclat. Les tôles constituant les parois du vaisseau se séparaient. Sous l'effet du quickening, le vaisseau se disloquait littéralement. Puis le souffle de l'explosion atteignit le hangar. Les flammes encerclèrent Marconi qui hurlait. Il recevait 2000 ans d'Immortalité, et en même temps il se consumait. Il vit son bras disparaître en poussière, emporté par les flammes. Le reste de son corps finit par subir le même sort. Puis le Shooting Star explosa pour de bon. Des flammes mêlées d'éclairs remplissèrent le ciel.

Robert avait pris les commandes de la navette et était parti depuis longtemps. Bug et Andrews discutaient juste derrière le siège du pilote. Nelson et Jim étaient assis tout au fond de la carlingue.

_"Que t'as dit le sergent, s'il venait à mourir?"

_"Nous devons retrouver un de ses amis Immortels, un certain North. Il vit en Afrique."

_"Où ça, en Afrique?"

_"Alors là, j'en sais rien. Il t'apprendra à te battre."

Robert demanda où ils allaient. Jim, d'une voix mêlée de tristesse en repensant à son ami Cesarius, lui répondit de mettre le cap sur l'Afrique.

Désormais, rien ne serait pareil. Jim le savait au fond de lui. La mort de Cesarius allait bouleverser son existence. Le vieux Romain lui avait fait part des espoirs qu'il avait placé dans Nelson. Il allait être celui qui débarasserait le mal de cette Terre. Il n'était pas le seul à l'avoir senti. Marconi, Derek. Et surtout Hägen, c'est pour cela qu'il avait voulu le tuer dans le hangar. Cesarius avait demandé à Jim d'aider Nelson dans sa quête. Et sa quête commençait par retrouver North.

Fin du 4ème épisode

 

A suivre...